Interview. Tim Dup : « L’Italie apparaît là comme une image cinématographique. Ce pays m’évoque aussi des souvenirs de vacances en famille, la gourmandise et l’ivresse »

Après « Qu’en restera-t-il ? », Tim Dup rêve toujours d’évasion et nous embarque dans « La course folle », celle que nous menons contre le temps, mais au rythme de la dolce vita. Solaire, son troisième album évoque l’Italie, sa lumière et ses couleurs, mais se termine à Osaka en compagnie de Saâne. Ses douze nouvelles escapades auront été aussi l’occasion d’autres rencontres, celles d’Anaïs Demoustier, d’Alexandre Tharaud, d’Aurélie Saada et de Thomas Encho. Pour en parler nous sommes allés, non à Sienne, mais à la sienne.

Tim Dup ©DR

Après « Qu’en restera-t-il ? », tu as décidé de baptiser ton album « La course folle », à quoi fait référence ce titre ?

Tim Dup : « Le titre du disque est en décalage avec les éléments qu’on peut y trouver comme la légèreté, la lumière, l’été et les couleurs italiennes, mais il symbolise le mouvement. J’aime embarquer les gens avec moi sur un album, les emmener faire des voyages ou à la découverte d’atmosphères. « Montecalvario », « L’avventura » et « Les cinquantièmes hurlants » évoquent le départ, jusqu’au-boutisme. « La course folle » fait référence au temps qui passe, un thème qui m’est cher, mais également à nos vies foisonnantes dans lesquelles on se perd parfois. Je réponds aussi un peu à la question de mon précédent album « Qu’en restera-t-il ? ». Je ne sais pas, mais des sensations sûrement. La réponse pourrait être cette phrase de Camus dans les « Noces », qui résume « La course folle » : « Hors du soleil, des baisers et des parfums sauvages, tout nous paraît futile » ».

« Montecalvario », extrait du troisième album de Tim Dup « La course folle »

Plus solaire que tes albums précédents, « La course folle » est composé d’éléments qui évoquent la dolce vita. L’Italie a été une source d’inspiration pour le réaliser ?

Tim Dup : « Je ne me suis pas dit que j’allais faire un disque italien. C’est venu au fur et à mesure, sans vraiment y réfléchir. Cet album est effectivement plus solaire et léger que mes précédents. L’Italie apparaît là plus comme une image cinématographique (La Nouvelle Vague et Fellini). Ce pays m’évoque aussi des souvenirs de vacances en famille, la gourmandise et l’ivresse ».

Tim Dup ©DR

« L’avventura », dont tu partage l’interprétation avec l’actrice Anaïs Demoustier, est-il un clin d’œil au film éponyme de Michelangelo Antonioni sorti en 1960 ?

Tim Dup : « C’est effectivement plus un clin d’œil qu’une inspiration directe. « L’avventura », c’est partir sans trop prévoir. Il y a cette phrase de Giacometti que j’aime : « La grande aventure, c’est de voir surgir quelque chose d’inconnu chaque jour dans le même visage. C’est plus grand que tous les voyages au tour du monde ». C’est assez tragique finalement, un peu shakespearien. Anaïs Demoustier chante cette chanson avec moi et amène toute sa cinématographie. Tu sens vraiment que c’est une interprète. Un jour, elle m’a écrit un message sur Instagram pour me dire qu’elle aimait bien ma musique. Au fil des discutions, elle m’a avoué qu’elle aimerait chanter, et même qu’elle écrivait et composait. J’ai d’ailleurs écouté ses chansons que j’aime beaucoup. Du coup, j’avais cette chanson et je lui ai proposé de la chanter avec moi. Je suis allé chez elle. Nous avons bu une bière, puis nous nous sommes mis autour du piano. Nous avons fait un essai piano-voix. J’ai tout de suite été convaincu ».

« Juste pour te plaire », extrait du nouvel album de Tim Dup « La course folle »

La première vidéo que tu as tournée pour cet album a été réalisée en Italie ? Elle illustre le titre le plus enjoué de l’album « Juste pour te plaire ». C’est un hymne au lâcher prise ?

Tim Dup : « La première vidéo de « Juste pour te plaire » a été tournée à Procida exactement, une petite île en face de Naples. J’y étais avec Diane pour faire la pochette du disque et les photos. Finalement, on a posé la caméra devant ce fond coloré et on a improvisé. Cette chanson ne raconte pas forcément une histoire d’amour ou de séduction, elle parle surtout de lâcher prise. A l’époque, mon entourage me mettait la pression pour que j’écrive une chanson un peu formatée pour la radio. Avec un peu d’ironie, j’ai lâché la pression pour ce titre mais je l’aime beaucoup finalement ».

« Juste pour te plaire », extrait du troisième album de Tim Dup « La course folle »

Tu as invité deux pianistes renommés, Alexandre Tharaud et Thomas Encho, à participer respectivement aux titres « Les cinquantièmes hurlants » et « La légèreté ». Le piano fait partie de toi, peux-tu nous raconter le lien que tu entretiens avec cet instrument ?

Tim Dup : « J’ai commencé la musique avec le piano, il y en avait un chez mes parents. Je ne l’ai jamais quitté. Pour moi, le piano est cinématographique et synonyme d’élégance. N’importe où, il donne une dimension de noblesse intimidante. Sur mes disques, j’enregistre généralement moi-même les pianos. Cette fois-ci, j’ai voulu inviter d’autres pianistes pour ne plus réfléchir à l’instrument et me consacrer pleinement à l’interprétation. Alexandre Tharaud et Thomas Enhco ont bien voulu se prêter au jeu. Mais, c’est aussi avant tout une histoire d’amitié. C’était une façon de les remercier de m’avoir épaulé au début de ma carrière ».

Tim Dup ©B. Gaboriaud

Nous l’avons compris, « La course folle » évoque l’Italie mais pourtant, tu termines l’album à « Osaka » avec Saâne.

Tim Dup : « Pendant le premier confinement, je suis retombé sur mon carnet de voyage au Japon que j’avais fait deux ans auparavant. J’étais parti seul avec mon sac à dos. J’y avais écrit notamment des haïkus, ses petits poèmes japonais. Il y avait dedans beaucoup de paix et de sérénité. Je me suis dit que ça pouvait être bien de finir le disque dans une certaine béatitude. « Qu’en restera-t-il ? » parlait aussi beaucoup de voyage. Il était accompagné d’un documentaire en partie tourné au Japon. J’aime bien créer des liens, des chemins ou tisser des toiles entre mes différents projets. Finalement, je crois que je parlerai toujours de voyage, du paradoxe de la mélancolie heureuse et du temps qui passe ».

La course folle, le troisième album de Tim Dup