Fan de Kraftwerk et Koudlam, comme de Brel et Barbara, Zaho de Sagazan débarque sur la scène française en faisant grand bruit, grâce à son premier album fascinant La symphonie des éclairs. Poétique mais ancré dans le réel, ce portait d’une jeune femme face à l’amour est aussi singulier qu’universel. Un condensé d’émotions fortes !

Conquis depuis quelques mois par sa musique sensationnelle dévoilée par petites touches sur les plateformes ou sur scène, nous sommes allés à la rencontre Zaho de Sagazan, décrite dans la presse comme un véritable phénomène.
Ton album s’intitule La symphonie des éclairs. Ces deux éléments définissent la couleur de ton album, un savant mélange d’arrangements symphoniques et d’électro électrisante, de piano/voix et de cold wave. C’est aussi le titre d’une chanson, ta plus personnelle, celle qui te définit le mieux.
Zaho de Sagazan : « Cet album est une symphonie de treize éclairs, treize émotions fortes qui peuvent faire mal mais qui me fascinent. Le refrain de la chanson très « météorologique » m’est apparu dans l’avion [rires]. Je regardais à travers le hublot et j’ai fait le constat qu’il fait toujours beau au-dessus des nuages. C’est une évidence mais sur le moment, ça m’a paru hallucinant. Pour rejoindre la piste d’atterrissage, nous sommes descendus dans les nuages. Il y avait des éclairs, la lumière était magnifique comme dans un tableau. Je me suis alors dit que si j’étais un oiseau, je volerais dans les orages. J’ai écrit un refrain que j’ai diffusé sur Instagram. Les gens l’ont bien aimé, ils m’ont demandé d’écrire la suite. A part dire que j’aime la pluie, je ne voyais pas quoi rajouter. J’ai décidé d’apporter au texte un peu de profondeur et de faire allusion à cette tempête que j’étais, enfant. J’étais et je reste très émotive. »

Tu parles aussi de toi dans Mon corps, de ce corps que tu détestais. Aujourd’hui, en tant qu’artiste tu es obligée de l’exposer, comment gères-tu cela ?
Zaho de Sagazan : « Ça n’a pas été simple. Sur Instagram, je me suis toujours montrée mais c’était différent car je contrôlais tout. Le plus compliqué, ça a été de confier mon image à d’autres artistes. J’ai confiance en eux mais je n’aime pas me découvrir du point de vue d’un autre. Je commence à m’habituer, il faut bien. »
Tu as une façon de chanter très particulière, très expressive, très humaine mais presque théâtrale, c’est un art qui t’arrive ?
Zaho de Sagazan : « J’aime beaucoup le théâtre surtout celui d’improvisation mais je n’en ai jamais fait, par contre, je m’amuse toute seule devant ma caméra depuis que je suis petite. »
La chanson Tristesse est coup de poing, un coup de de maître, tout le monde s’y reconnaît ! A l’heure où les réseaux sociaux poussent les gens à afficher une vitalité débordante, une joie fabriquée, une happy face surjouée, toi tu nous parles de tristesse. D’où t’est venue l’idée ?
Zaho de Sagazan : « Je suis pragmatique, logique et rationnelle. A l’époque, j’étais follement amoureuse d’un ami. J’ai vite compris que lui non. Pour me rassurer, je fais appel aux chiffres. La probabilité pour que nous soyons amoureux l’un de l’autre était véritablement mince. Le problème ne venait donc pas de moi, je me rassurais ainsi pour ne pas être triste. Je pensais avoir cette sagesse formidable que les autres n’ont pas. En réalité, pas du tout, « Tristesse est là ». »
Dans la chanson, il s’agit davantage d’une tristesse latente mais ambiante, plus qu’une tristesse liée à un événement en particulier.
Zaho de Sagazan : « Oui, c’est une tristesse ambiante liée à un manque de confiance en moi. Ma crise d’adolescence vient à peine de se terminer. J’avais tout pour être heureuse mais je détestais mon corps. J’étais très émotive. Des émotions sommeillaient en moi mais elles ont fini par surgir. Contrairement à ce que je croyais, je ne maîtrisais absolument rien. »
Cet album parle aussi des garçons, des toxiques dans Les dormantes, et puis de tous les autres dans Les garçons, un rapport avec #metoo ? Envie de les défendre un peu ?
Zaho de Sagazan : « Non, j’avais quinze ans quand j’ai écrit cette chanson. Je découvrais les garçons. Il y en avait tellement, de différents. Il y a du bon à prendre chez chacun d’entre eux, « ils sont tous beaux à leur façon ». Cette chanson est très simple, un peu légère. Dans Les dormantes, je parle d’un sale type de garçon toxique et manipulateur, mais je ne dirais pas que tous les garçons sont des connards. Il y en a, mais il y en a aussi des supers. C’est d’ailleurs pourquoi j’écris que je ne vais pas m’embêter avec un seul. Je ne vais pas pleurer sur une histoire qui se termine alors qu’il y en a tant d’autres à vivre. C’est un peu ce que je raconte dans Les garçons, cette chanson powerfull. »

La symphonie des éclairs, le premier album de Zaho de Sagazan