INTERVIEW. Clio : « Dans mes chansons, je parle de moi, mais pas de ma vie »

Depuis 2016, et la parution de son premier album éponyme, Clio distille avec talent et fantaisie sa mélancolie rythmée le temps de chansons pop subtilement nuancées et consacrées aux petits tracas de la vie amoureuse. Cette fois-ci, ils prennent l’allure de doux Carambolages, le titre de son quatrième album, déjà. Nous sommes partis à sa rencontre pour en parler.

Clio © DR

Votre quatrième album s’intitule Carambolages, un mot qui évoque une certaine violence et qui contraste avec l’univers acidulé mais parfois corrosif de vos chansons.

Clio : « Pour certains, le mot carambolage est associé à une certaine violence, mais pour ma part, pas du tout ! Il sonne bien ! Il m’évoque l’univers du jouet. Dans mes textes, je parle essentiellement des petits tracas de la vie amoureuse, et je trouvais assez amusant de les imaginer comme des carambolages ».

Carambolage, c’est aussi le titre d’une chanson, un duo avec Alex Beaupain. 

Clio : « Alex Beaupain fait partie des artistes que j’admire. J’écoute ses chansons depuis qu’il en écrit. Nous nous étions déjà croisés mais c’est la première fois que nous collaborons. Initialement, la chanson Carambolage n’avait pas été imaginée pour être un duo, mais au fil du temps, j’ai pensé qu’elle prendrait tout son sens à l’être. A ce moment-là, j’ai tout de suite pensé à Alex. Je lui ai proposé et il a accepté immédiatement. C’est assez drôle, car nous nous sommes rendus compte que nous n’avons, ni lui ni moi, le permis de conduire. Ce duo est finalement totalement improbable ! 

Clio – Carambolage, en duo avec Alex Beaupain

Dans ce nouvel album, comme dans les précédents, vos chansons parlent de ce qui nous touche tous : la vie amoureuse.

Clio : « Parfois, je me demande pourquoi je n’écris que sur ça, mais finalement quand je regarde autour de moi, je réalise que les gens ne parlent pas tant que ça d’autre chose. Ça me rassure et le sujet est une source inépuisable d’inspiration. J’écris des histoires avec des rencontres et des départs en toile de fond mais surtout des tranches de vie ». 

Des tranches de vie qui évoquent celles qu’on trouve dans les films de la Nouvelle Vague.

Clio : « Je me suis beaucoup nourrie des films de la Nouvelle Vague. Dire que je m’y retrouve serait prétentieux, mais ça ne m’étonne pas que cela transparaisse dans mon travail. Les images et le ton de cette époque m’ont beaucoup touchée et accompagnée ». 

Mais alors qui est l’héroïne de vos chansons ?

Clio : « Dans mes chansons, je parle de moi, mais pas de ma vie. Ces alter-egos vivent la leur. Je n’y raconte jamais les événements que j’ai vécus mais plutôt ceux qui pourraient m’arriver. En ce sens, l’écriture est merveilleuse. Elle offre la possibilité de s’inventer des tas de petites histoires, d’ouvrir une fenêtre vers d’autres horizons, c’est une chance ».

Clio – L’imbécile

Dans L’imbécile, la narratrice, véritable personnage rohmérien, avoue à son compagnon, avec une légèreté déconcertante, avoir embrassé un autre garçon. 

Clio : « Cette scène ne peut pas arriver dans la vie. Mais je trouvais intéressant que le personnage puisse faire des aveux terribles avec autant de légèreté et que l’autre puisse les recevoir avec la même légèreté. Mais, il n’y a que dans les chansons que nous pouvons vivre de cette façon-là ». 

L’action de vos chansons se passent souvent à Paris, comme dans l’ultime titre de l’album Paris sans toi. Aujourd’hui, vous n’y habitez plus, mais finalement la ville ne cesse de vous inspirer.

Clio : « Je n’y habite plus au quotidien mais j’y suis très souvent. Paris reste le décor de mes chansons, j’ai beaucoup de mal à les imaginer ailleurs ». 

Clio © DR

Vos albums sont faits de rencontres, de séparations, d’absences et de balades solitaires et ici d’une en Taxi.

Clio : « En fait, je ne prends pas beaucoup le taxi, je me déplace davantage en vélo, mais le taxi a une dimension très romanesque. Cette action d’entrer dans la voiture d’une personne que l’on ne connaît pas mais qui nous emmène où on veut, peut être troublante. Parfois on parle, parfois un silence s’installe. Avec le chauffeur, on partage du temps dans l’intimité. Évidemment, pour des raisons pratiques, il m’arrive de sauter dans un taxi, et dans cette vie d’artiste ou pas, regarder défiler la ville dans une voiture d’emprunt me fascine ». 

La plupart de vos chansons sont teintées de sonorités électroniques, mais Là je suis saoule, particulièrement poignante, se démarque par son dépouillement et donne un peu le ton que les autres prendrons sur scène.

Clio : « Cette chanson parle des états d’âme de quelqu’un d’un peu ivre qui aime trop l’existence et qui a peur qu’elle passe trop vite, le piano lui suffisait. Sur scène en effet, j’ai eu envie d’être au plus près de mes chansons telles que je les fabrique, avec peu de matière. Nous serons trois, avec peu de bazar et un son mesuré, dans une configuration intimiste ». 

Clio en concert à Paris les 19 et 20 décembre 2023 et les 2 et 3 janvier 2024 au Théâtre de la Flèche. Le 15 mai 2024 à l’Européen. Le 13 novembre 2024, à La Cigale.

Carambolages, le quatrième album de Clio