Contrairement à ce que son nom pourrait faire croire, Chien Noir est rempli de douceur et le prouve avec « Histoires Vraies », un premier EP d’une grande délicatesse. Ses chansons ressemblent a des comptines pour adultes, en rapport avec les préoccupations d’un homme de 35 ans. Inspiré par sa maison d’enfance et Sufjan Stevens, Jean Grillet, de son vrai nom, les a composées à Bordeaux et a invité HollySiz à poser sa voix sur le duo « La nuit le vent ». Mais c’est à Paris, à l’heure du déconfinement, que nous l’avons rencontré pour en parler.

Chien Noir, ton nom de scène, est un clin d’œil au roman « L’île au trésor » de Stevenson. Pourquoi l’avoir choisi ?
Chien Noir : « « L’île au trésor » a un lien direct avec mon enfance et l’enfance est fondamentale dans mon écriture. Je suis toujours à la recherche de mon moi originel. J’aime bien l’image du chien. C’est un gardien et un compagnon. Robert Louis Stevenson et Jack London m’ont beaucoup influencé. J’ai vraiment eu des révélations en lisant Jack London. « L’Appel de la forêt » est un livre incroyable, je ne m’en suis pas remis. C’est l’histoire d’un chien de race qui est enlevé puis vendu à un chercheur d’or. Il se retrouve dans le Yukon, chien d’attelage, et retourne à l’état sauvage. Je trouve cette image très forte ».
Ton EP « Histoires Vraies » évoque des comptines mais pour adultes, c’était une idée de départ ?
Chien Noir : « Ça n’était pas une idée de départ, plutôt un constat. J’écris de façon instinctive. Parfois, des couplets entiers me viennent en quinze secondes, comme un sursaut avec la boule au ventre ou des larmes. A posteriori, j’essaie de comprendre ce que j’ai écrit et je structure mes idées. Pour « Lumière bleue », le point de départ a été une image, celle de cette lumière qui se reflétait au plafond, un soir. Pour la chanson « Histoire Vraie », j’ai pensé à une image de « La Nausée », le roman de Sarte qui m’a toujours intrigué et encore plus avec le confinement. Au final, elle parle de ma famille et plus largement des secrets de famille, des choses qu’on ne dit pas, qu’on garde sous cloche, qu’on raconte à voix basse… et comment on se construit avec ça. « Histoire Vraie », c’est une quête de soi ».
« Qu’est-ce que tu fais dans le noir » évoque des terreurs nocturnes. Apparemment, tu as grandi dans une maison hantée, mais au sens propre du terme ?
Chien Noir : « Dans mes souvenirs, oui ! Mais ces histoires de fantômes sont un prétexte pour raconter autre chose. Elles sont imprégnées dans les murs. C’est un héritage. Cette maison était à la campagne, au milieu des vignes, en haut d’une colline en Gironde : un vrai paradis sur Terre ! Mais la nuit, j’étais profondément angoissé car j’étais somnambule. Je le suis toujours d’ailleurs. Beaucoup de mon imaginaire vient de ces terreurs nocturnes et de cette maison. J’avais besoin de m’échapper de ce monde parallèle que je ne voyais pas mais que j’avais l’impression de ressentir. Cette maison m’évoque aussi la Toscane. Je me souviens des couchers et des levers de soleil. C’était magnifique. La chanson « Drôle de vie » se passe en Italie, j’aspire à y vivre, on y ressent vraiment la douceur de vivre ».

Tu aimes beaucoup Sufjan Stevens, pourrait-il être ton mentor spirituel ?
Chien Noir : « J’ai découvert Sufjan Stevens avec « Illinois » (2005), mais son album qui m’a le plus marqué, c’est « Carrie & Lowell » (2015). A ce moment là, je n’allais pas très bien et il y avait tellement de douceur dedans. Les textes sont magnifiques. Les clips aussi. Les plans fixes en slow motion m’ont totalement envoûté. Cet album m’a soulagé, il y parle de son enfance. Je me suis dit qu’on peut donc parler de choses très personnelles, de sa famille et de ses parents, avec douceur. Cette douceur, j’en avais besoin ».
Et la suite ?
Chien Noir : « Je suis en train d’écrire un album. Le confinement m’a un peu abîmé comme tout le monde, mais là c’est partie ».

Histoires Vraies, le premier EP de Chien Noir