Les Ailes du désir de Bruno Bouché, un envol acrobatique et maîtrisé

Le chorégraphe et ex danseur de l’Opéra de Paris, Bruno Bouché signe un ballet un brin acrobatique inspiré de Les Ailes du désir, le chef-d’œuvre de Wim Wenders.

Les ailes du désir – Bruno Bouché – Ballet de l’Opéra du Rhin – Teaser

Directeur artistique du CCN-Ballet de l’Opéra national du Rhin depuis 2017, Bruno Bouché embarque son équipe dans Les Ailes du désir, une adaptation libre et flamboyante du film poétique de Wim Wenders, Prix de la mise en scène au festival de Cannes, en 1987. 

Les Ailes du Désir © Agathe Poupeney

Adapté un chef-d’œuvre cinématographique au théâtre ou en ballet est un exercice périlleux et se révèle souvent raté. Après un début, sombre et urbain, un peu poussif mais qui contient son lot de tableaux grandioses, comme des marches groupées et dynamiques au rythme de la musique de Steve Reich qui évoquent le Tanztheater Wuppertal fondé par Pina Bausch, cette version ballet proposée par Bruno Bouché décolle lors du second acte, blanc et astral, délesté du scénario originel. 

Les Ailes du Désir © Agathe Poupeney

Pour en saisir le sens, mieux vaut réviser le synopsis : dans le Berlin des années 80, les anges s’intéressent aux mortels, ils les épient jusque dans leur intimité, pouvant en saisir les moindres secrets. Mais à trop y regarder, un d’entre eux tombe amoureux d’une trapéziste et devient mortel pour aller à sa rencontre. L’image culte, dans laquelle l’acteur Bruno Ganz (1941-2019), ange en manteau, surplombe l’humanité souffrante, hante encore les cinéphiles et ouvre ce ballet qui souffre forcément de quelques comparaisons. Le concert de Nick Cave, scène phare du film, a été remplacé par un club libertin dans lequel résonne Silence is sexy du groupe de musique industrielle allemand Einstürzende Neubaten et le clin d’œil à Peter Falk interprétant son propre rôle dans le film perd ici forcément son intérêt. 

Les Ailes du Désir © Agathe Poupeney

La dramaturgie, agrémentée de symboles, comme des clés de compréhension, est assez confuse mais contient suffisamment de poésie pour capter l’attention et emmener le spectateur vers un final flamboyant. Les trente deux danseurs investissent toute la scène le temps de vertigineux chassés-croisés jouissifs, composés de portés et de sauts spectaculaires, presque acrobatiques. Point d’orgue de ce final, le duo amoureux de danseurs, aérien et sensuel, sublimé par le déchirant Hope There’s Someone d’Antony and the Johnsons est totalement à la hauteur de l’œuvre de Wim Wenders, profondément romantique !

Bruno Bouché / Ballet de l’Opéra national de Rhin au Théâtre du Châtelet / Théâtre de la Ville, Paris, jusqu’au 1er avril 2023.