Après le succès critique de Hollydays, Sébastien Delage se lance en solitaire et dévoile « Fou », un premier EP prometteur qui préfigure un album à venir à la rentrée. Ses nouvelles chansons intimes et poignantes ont été produites en toute liberté par son propre label « Drama Queen Music ». Blondino a elle aussi créé le sien pour réaliser « Un Paradis pour moi », un deuxième album crépusculaire et aérien. Les deux artistes se connaissent bien, c’est pourquoi nous avons choisi de les réunir même s’ils appréhendent la musique d’une manière différente.

Nous : « Sebatien, pour ce premier Ep en solitaire, tu t’es orienté vers le garage, le genre musical. Peux-tu nous expliquer ta démarche ? »
Sébastien Delage : « L’ADN de mon projet personnel n’est pas si différent de celui d’Hollydays. Avant, j’avais une culture anglo-saxonne. J’écoutais et j’écoute toujours d’ailleurs, c’est mon côté ado attardé, Nirvana, Radiohead, Deus, Blur… J’ai composé l’Ep et mon album, prévu pour la rentrée 2022, en même temps. J’ai voulu tout produire en guitare-basse-batterie pour obtenir une esthétique brute. L’Ep est clairement indie, l’album sera lui beaucoup plus garage. Il s’appelle « Rien compris » et sera la suite directe de « Fou », mais un peu plus radical, un peu plus sombre et un peu plus rugueux. Il se positionnera entre les chansons « Fou » et « Chanson de baise ». »
Nous : « Tes textes sont intimes et puissants. Tu y abordes notamment ouvertement ton homosexualité et la sexualité de manière décomplexée. »
Sébastien Delage : « Quand je m’affranchis de la censure, j’écris beaucoup plus facilement. La censure inclut souvent les évènements intimes. Au-delà de la pandémie, j’ai traversé une année 2020 compliquée. J’ai vécu une rupture amoureuse et professionnelle, et je me soigne avec des choses qui me font du bien, ça passe forcément par la sexualité. On irait tous mieux si on faisait bien l’amour. Un orgasme au petit-déj et voilà [rires]. »
Blondino : « Une belle manière de commencer la journée. »
Sébastien Delage : « Plus sérieusement, l’homosexualité n’est pas pour moi un sujet, c’est ma réalité. En 2017, quand je faisais encore partie de Hollydays, un directeur artistique m’a demandé de ne pas dire en interview que j’étais gay car on risquait de perdre du public. Aujourd’hui, il ne dirait peut-être pas ça mais j’ai décidé de soutenir la scène queer, trans… avec mon label « Drama Queen Music ». Je le fais vraiment par conviction. »
Nous : « Blondino, malgré une pochette plus lumineuse, les chansons de ton deuxième album « Un paradis pour moi » restent crépusculaires, à l’image de « Les Madrilènes » qui parle de rupture qui sent encore les draps humides. »
Blondino : « J’avais la sensation d’avoir écrit des chansons beaucoup plus lumineuses. Je voulais les situer à l’aube, d’où la pochette. Mais finalement, chasser le naturel, il revient au galop ».
Nous : « Ce serait quoi le Paradis pour toi ? »
Blondino : « Faire de la musique dans un endroit où il fait toujours beau. C’est ce qui me pousse à me lever le matin. »
Sébastien Delage : « Avec un orgasme tous les matins [rires]. »
Nous : « Sébastien, tu viens de dévoiler un nouveau clip, celui de la chanson « Fou », tu t’y livres particulièrement. Vois-tu la musique comme un exutoire ? »
Sébastien Delage : « « Fou » parle de bipolarité, de quand on ne sait plus comment mettre un pied devant l’autre. La musique, c’est un peu ma médecine. C’est la première chanson que j’ai écrite et chantée. Avec Hollydays, je faisais quelques cœurs mais l’ingénieur du son baissait toujours mon volume [rires]. »
Blondino : « Elle est vraiment touchante cette chanson. Moi, je ne balance pas tout comme si j’étais chez le psy, j’ai besoin d’une certaine distance. »
Sébastien Delage : « [rires] C’est plus imagé chez toi. »
Blondino : « Oui, pour moi, c’est surtout le chant qui me fait du bien. En chantant, je ressens des sensations fortes qui m’apaisent. Le point d’entrée dans la musique, c’est vraiment le chant pour moi. »
Sébastien Delage : « Moi, c’est exactement l’inverse. Sans texte, je ne peux pas faire de chanson. Pendant ma période un peu sombre de 2020, je suis allé voir un ami, Clément Grelot, que je n’avais pas vu depuis longtemps. On s’est bourré la gueule en se racontant nos vies. Le lendemain, il m’a envoyé un texte alors que ce n’est pas son métier. Dans ce texte « Une longue histoire », il se met à ma place et raconte notre soirée de la veille. En le découvrant, je me suis dit qu’en écrivant simplement et sincèrement, je pouvais y arriver. Au final, nous avons quasiment écrit l’Ep à quatre mains. Pour toi Blondino, j’ai l’impression que pour écrire, le cinéma tient une place importante, tes chansons me paraissent très cinématographiques. »
Nous : « D’ailleurs, le clip de « La Foudre » est une succession de fins cinématographiques. »
Blondino : « C’est vrai. En studio, un film peut m’inspirer pour créer les arrangements et l’atmosphère. Pour « La Foudre », j’ai beaucoup pensé à « Melancholia » de Lars von Trier. Pour « Un Paradis pour moi », quand je suis arrivée en studio, j’ai dit que c’était un mélange de « Cléo de 5 à 7 » d’Agnès Varda et du « Le Labyrinthe de Pan » de Guillermo del Toro, ce qui, je le conçois, peut être difficile à saisir [rires]. Pour moi, c’est très clair : une musique de Michel Legrand dans un labyrinthe de l’étrange avec une fille qui erre. Le résultat correspond à cette idée que j’avais. J’écoute beaucoup de musique de film. J’adorerais même écrire une musique de film. Je lance un appel [rires]. Les films avec des personnages qui font échos à ma vie m’inspirent souvent comme « Oslo, 31 août » pour la chanson « Oslo. »
Sébastien Delage : « J’adore aussi la musique de film, j’ai fait des études de ciné, j’ai été bercé par la musique de Danny Elfman qui a travaillé avec Tim Burton, mais la mienne est vraiment différente. »

Un Paradis pour moi, le second album de Blondino

Fou, le premier Ep de Sébastien Delage