Affranchie d’un duo musical et amoureux, la prodigieuse Nina débarque sur la scène musicale pour nous adresser son « Adieu », qui n’est rien d’autre qu’une renaissance. Dans la lignée de Clara Luciani ou Fishbach, la jeune artiste de 24 ans marche seule vers le succès grâce à ce premier EP introspectif et crépusculaire, agrémenté de claviers froids un brin 80’s et de mélodies entêtantes. Romantiques, sombres et envoûtantes, ses chansons témoignent à la fois d’une hypersensibilité et d’une force émergente redoutable. Nous sommes allés à sa rencontre…

Ton premier EP, comme la première chanson que tu as écrite, s’appelle « Adieu », curieux pour débuter une carrière, comment t’es venue l’idée ?
Nina : « J’ai longtemps hésité, mais je l’ai finalement appelé « Adieu » parce que mon premier titre s’appelait comme ça ! C’est le mot qui illustre le mieux ce que j’ai vécu ces dernières années. C’est un adieu qui est lié à la rupture d’une relation et d’un duo musical dont je faisais partie. J’ai dû mettre fin à tout cela pour m’affirmer en tant qu’individu. Ça s’est fait progressivement mais à la fois de manière brutale et rapide. Cet « Adieu » n’est pas une fin, c’est le début d’une nouvelle histoire. Et puis, c’est assez drôle de commencer une carrière en disant au revoir. »

En fait, cet « Adieu », c’est une renaissance ?
Nina : « Totalement, c’est une renaissance. C’est se redécouvrir, comprendre qui on est et oser l’assumer. Je ne voulais plus me cacher derrière les autres, suivre d’autres personnes et penser que les autres avaient des réponses à mes questions, alors que parfois aucune réponse n’existe. Je suis extrêmement reconnaissante d’avoir pris conscience de tout cela maintenant, à 23 ans, quand je me suis lancée. C’est une libération ! Vraiment [rires]. Je voulais m’affirmer et aussi écrire des choses assez intimes, et en duo c’est compliqué. »
Pour écrire une partie d’« Adieu », tu es partie, telle une fuite, à Fuerteventura, pourquoi ce point de chute ?
Nina : « J’y suis allée pendant les restrictions sanitaires dues au COVID. Ce n’était donc pas la meilleure période, mais c’était le bon moment, celui où j’ai décidé de mettre fin à mon duo musical. Mon père est à la retraite et y était à ce moment-là, mon frère l’avait rejoint. En pleine période morose où tout était en stand-by à Paris, je me suis dit qu’il fallait que je les rejoigne. Je suis donc partie, mais avec le recul, je crois que j’avais aussi besoin de fuir l’environnement dans lequel j’étais et qui m’était trop familier, les rues que j’avais arpentées pendant trop longtemps. Ce voyage m’a permis d’éviter une dépression. J’ai retrouvé un cocon familial qui m’a fait un bien fou, surtout que nous n’avions jamais vécu tous les trois ensemble. Cela m’a aidé à créer mes propres chansons et à aller au bout de ma démarche artistique. C’était mon rêve depuis toujours. Cet amour familial m’a vraiment porté. Fuerteventura a été aussi une grosse claque. Les montagnes, l’océan, le désert… les paysages y sont incroyables. J’ai beaucoup marché seule ou avec mon frère, en faisant un travail d’introspection. Sur l’’île, j’ai écrit deux chansons, « Marée Basse » et « Les Garçons », et j’ai poursuivi à Paris.
La chanson « Elle », commence par ces quelques mots « Elle marche seule », on pense évidemment à « Je marche seul », le tube de Jean-Jacques Goldman, même un peu dans la mélodie, mais juste pour cette phrase, est-ce un clin d’œil ?
Nina : « Il n’y a absolument pas de clin d’œil, mais cette chanson m’a aussi évoqué la chanson de Jean-Jacques Goldman après coup ! J’en ai parlé à des amis qui trouvaient ça trop marrant. Avec tout le respect que j’ai pour lui, ce n’est pas vraiment un artiste que j’ai écouté. C’est pas trop ma came, mais j’ai gardé cette phrase, en me disant que la première intention est la meilleure. »
Du coup, c’est quoi ta came ?
Nina : « J’adore la chanson française, Balavoine, Sanson, Berger… j’ai été bercée par la radio Nostalgie. Je suis fan de Serges Gainsbourg, il y a une rigueur dans les textes et une mélodie incroyable. C’est un artiste très curieux qui n’a pas eu peur de s’essayer à d’autres styles et qui a su s’affranchir de ses propres codes. Il a beaucoup innové. J’écoute aussi beaucoup Tame Impala. Pendant que j’enregistrais l’EP, j’écoutais énormément John Maus et Molly Nilsson, j’aime beaucoup leurs textures et leurs rangements un peu « sales ». Leurs productions un peu anticonformistes m’ont beaucoup parlé et inspiré. John Maus pour les synthés flamboyants. Quand j’étais petite, j’adorais Boney M. et Bob Marley. J’adore Damso, je suis fan. J’adorerais faire un feat. avec lui. »

Ta façon de chanter est très frontale, ça a toujours été le cas ?
Nina : « Ce n’était pas le cas du tout. Avant, je n’arrivais pas à trouver ma place. Ma voix était beaucoup plus frêle, plus dissimulée. Je n’ai pas vraiment travaillé pour changer ça, la vie s’en est mêlée. Ça s’est imposé à moi ! L’assurance et la confiance que j’ai acquises m’ont permis de chanter de cette façon-là. Mais, il ne faut pas croire que tout est réglé, je doute beaucoup, je suis mal à l’aise en public. Je me justifie souvent. Ce qui me sauve, c’est que je m’autorise à faire des chansons. »
Certains textes ou phrases m’évoquent la Nouvelle Vague, est-ce que c’est un cinéma que tu as regardé ?
Nina : « Mon père adore le cinéma et il m’a fait voir beaucoup de films que je regardais parfois d’un seul œil, mais inconsciemment ça m’a forcément influencée. Dans ces films-là, il y a une philosophie, une vision de la vie, de l’amour et du romantique particulière. Forcément quand tu es une jeune femme, ça te marque. En ce moment, la vision du couple se déconstruit énormément, et c’est très bien, mais cette vision est ancrée en nous. On parlait peu de toxicité. Moi, je pensais que tout était de ma faute. Mais en fait non ! Il faut un équilibre. Être en couple ce n’est pas être psy, il faut avoir une oreille attentive bien sûr mais il y a des limites à se fixer. A moment donné, il faut comprendre qu’on ne peut plus donner. Il faut savoir donner mais aussi recevoir. La vie c’est un mystère, je ne comprends pas tout. C’est bien qu’il y ait des choses qui nous échappent. Ça nous stimule. J’ai eu quelques retours sur l’EP. Des gens ont trouvé ça violent ou frontal, mais j’ai été sincère. »

Adieu, le premier EP de Nina